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table ronde : Internet juridique : nouveaux moyens, nouvelles inégalités. M. David MERKIN
Données et services juridiques en ligne : l’évolution du "commerce" du droit sur Internet.
vendredi 5 novembre 2004, par
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M. David MERKIN, Coordinator of Library Services, Shearman & Sterling LLP ; President Law Library Association of Greater New York - USA
Les bibliothèques de droit se sont informatisées et numérisées depuis la
création de Lexis en 1974. Les juristes utilisent internet depuis l’orée de
la décennie 90. Les recherches autrefois laborieusement accomplies au
travers de piles et étagères d’ouvrages s’effectuent à présent par la
simple frappe de quelques touches sur le clavier d’un ordinateur. Si l’on
peut affirmer que les recherches sont plus aisées aujourd’hui qu’hier, il
est également exact que pour les bibliothécaires, qui sont à la tête de ces
mutations, le travail est en définitive plus complexe qu’auparavant, et les
budgets à mettre en oeuvre plus élevés qu’ils ne l’ont jamais été.
De manière croissante, les informations sont disponibles au format
électronique. Dans cet environnement stimulant mais incertain, en constante
mutation, les fournisseurs doivent évidemment protéger leurs
investissements. Ils se tournent vers le régime juridique des licences
d’utilisation pour définir et contrôler l’usage de leurs produits. Aussi,
en sus du respect du droit d’auteur, les bibliothécaires doivent désormais
gérer l’usage de l’information électronique en conformité avec les termes
des licences. L’attention doit être portée sur les détails et sur les
effets des accords de licence sur nos firmes et nos utilisateurs.
La fonction fondamentale du bibliothécaire reste inchangée : délivrer
l’information à son usager. Mais aujourd’hui, et parce que cela nous est
désormais possible, nous le faisons sur une base mondiale, en recourant à
bien plus d’outils et pour un volume d’information bien plus élevé. Dans le
cas de Shearman & Sterling, nous négocions avec nos fournisseurs des
accords globaux, couvrant l’accès par notre bureau de NY et par les 18
autres bureaux situés au travers du monde. Bien entendu, les coûts relatifs
à l’information électronique ne cessent d’augmenter.
Comme nous le savons tous, les accords de licence sont incontournables
lorsque nous recourrons aux banques de données. Les éditeurs recourent aux
accords de licence pour contrôler l’usage de leurs produits. Certains
accords restreignent les droits des utilisateurs.
Négocier les accords de licence est devenu une tâche complexe. De nombreux
bibliothécaires font appel aux juristes ou responsables administratifs et
financiers de leurs firmes pour les assister et les aider à mieux
appréhender les concepts juridiques et optimiser les budgets.
Beaucoup d’éditeurs facturent leurs prestations électroniques selon le
nombre d’avocats ou de bureau d’une firme. Certains éditeurs facturent
l’usage de leur produit sur le chiffre théorique de 100 utilisateurs alors
que le nombre réel est de 30, d’autres calculent leurs tarifs sur
l’utilisation simultanée. Dans ces cas, le recours aux avocats ou
responsables financiers permet d’obtenir de meilleures conditions, sans
indisposer l’éditeur.
Lorsque l’on négocie les accords de licence, il faut définir les
départements, les bureaux qui seront les principaux utilisateurs et
toujours conserver à l’esprit son budget.
Quand les bibliothèques s’abonnent aux ressources électroniques, les
accords de licence, comme bien d’autres contrats prérédigés, ne sont pas
négociables et s’avèrent incompréhensibles au non-juriste. Les
bibliothécaires ont systématiquement accepté les termes des contrats de
licence en raison des avantages procurés par l’information électronique.
Les bibliothèques de NY se séparent désormais des collections imprimées de
recueils de jurisprudence, recueils législatifs, codes.
Avec le temps, les directeurs de bibliothèques ont reçu et signé les
accords de licences. Des clauses limitant l’usage à quatre utilisateurs
simultanés ou obligeant à la conservation d’un abonnement papier sont de
plus en plus fréquentes dans les accords de licence. On a souvent oublié de
prendre en considération qu’il y a des moyens de vérifier si l’usage est
bien conforme à l’accord souscrit. Très souvent désormais, les accords de
licence prévoient l’interruption immédiate de fourniture de l’information
en cas de retard de paiement.
Gérer et se conformer aux accords de licence est devenue une tâche
supplémentaire, s’ajoutant aux fonctions habituelles des bibliothécaires.
Une fois l’accord signé, qui s’applique à toute la firme et à ses employés,
qui peuvent d’ailleurs n’avoir jamais à utiliser ou même seulement
connaître l’existence de la banque de données, c’est le devoir du
bibliothécaire de s’assurer du respect des clauses de l’accord de licence.
Habituellement, les bibliothécaires indiquent aux utilisateurs que les
questions concernant l’accès ou l’usage de ressources doivent leur être
adressées.
Beaucoup de bibliothécaires refuseront un accord de licence spécifiant
l’interdiction de se désabonner de la version papier, ou encore si la
définition du lieu d’utilisation ou de la notion d’utilisateur n’est pas
claire, ou si la bibliothèque peut être tenue responsable en cas de
non-respect du contrat par un utilisateur.
Les bibliothécaires, en délivrant les mots de passe aux sources
électroniques d’information, prennent le temps et le soin de former les
utilisateurs à leur utilisation et à les informer des conditions légales
d’utilisations. Si un bibliothécaire est témoin d’une violation de l’accord
de licence par un utilisateur, il lui supprime, en général, ses droits
d’accès.
Les accords de licence autorisent l’affichage à l’écran et l’impression de
pages, de même que l’enregistrement sur disque, sauf s’il s’agit de disque
serveurs ou de tout matériel connecté à un réseau.
Le droit d’auteur est reformulé en accord de licence qui spécifie que
l’accord préalable de l’éditeur est indispensable pour toute
redistribution. Tous les accords de licence interdisent de supprimer les
mentions de propriétés intellectuelles et de marques ainsi que la création
d’une banque de données à partir des documents téléchargés.
Cependant, les sites qui diffusent des brèves et nouvelles en autorisent
l’impression et le téléchargement à condition que le bas de chaque page
mentionnent « reproduit avec la permission de » suivi du nom de l’éditeur.
Droits de reproduction de téléchargement sont fréquemment accordés quand le
requérant invoque certains usages, tel l’enseignement où la rédaction d’un
article de journal.
Le régime juridique du droit d’auteur est le même, qu’il s’agisse d’ ?uvres
imprimées ou au format électronique. Le « Digital Millenium Copyright Act »
a mis à jour le « Copyright Law for Electronic Use » de 1976.
Beaucoup d’utilisateurs croient à tort que l’information en ligne peut être
reproduite et distribuée librement. Ces lois sur le droit d’auteur et la
propriété intellectuelle ont fait cesser pillage par les grands éditeurs de
contenu appartenant à des éditeurs plus modestes.
La tendance actuelle est claire : si les bibliothèques veulent pouvoir
télécharger, imprimer ou redistribuer le contenu d’articles, journaux ou
livres, elles doivent négocier ces droits qui doivent ensuite figurer dans
l’accord de licence. De gros volumes d’information pourront être acquis
pour être mis à disposition de tous les bureaux d’une firme. Aussi, tous
les contrats, les accords doivent faire l’objet d’une étude attentive avant
signature et présentations aux usagers. C’est devenu une contrainte usuelle
dans le secteur de l’information électronique. Négocier et comprendre les
accords de licence est le nouveau défi posé aux bibliothécaires du secteur
juridique.
Voir en ligne : LLAGNY : Law Library Association of Greater New York